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  • Photo du rédacteurLucie & Jérémy

11 jours à pied sur la traversée Belluno - Innsbruck

Après avoir longtemps cherché sur les sites et bouquins un trek à travers les Alpes, Lucie est tombée sur un site allemand présentant la traversée de Munich à Venise. L'idée d'entreprendre ce périple transfrontalier de l'Italie à l'Autriche nous a directement attirés avec ses passages dans les Dolomites et le Tyrol.

C'est alors que nous avons entrepris ce périple de 227 km, en août 2016, à l'aide de nos cartes dénichées et assemblées par Jérémy.

Il est bien difficile pour nous de résumer toutes les merveilles de cette traversée en une phrase mais en bref nous avons adoré marcher le long de ces immenses blocs rocheux, contempler ces alpages verdoyants, emprunter tous ces sentiers câblés donnant le vertige, admirer ces chalets typiques aux balcons fleuris et surtout déguster toutes ces bières fraîches et apfel strudel.

Etape 1 : Belluno - Rif. Bianchet 9 km / + 900 m

Un blablacar pour se rendre à Venise, une visite nocturne de la ville, un train pour Belluno le lendemain et un bus pour La Pissa (486 m), nous permettent d'atteindre le départ du trek (le départ officiel de la Via Alta 1 également).

Il est 16h quand nous débutons l'ascension après un bel orage. La montée se fait dans une forêt dense et humide... dominée par la face nord de la Schiara.

A notre arrivée au Refuge Bianchet (1245 m), il est déjà 19h alors on demande au gardien si on peut planter notre tente autour. C'est un non catégorique ! (Nous ne comprenons pas si la règlementation est la même que dans nos parcs nationaux concernant le bivouac). Pas le choix, il faut continuer à avancer. 30 mn plus tard, aucune zone de replat dans cette vallée regorgeant de végétation à part un énorme rocher plat qui nous fait de l'oeil. Une chance que la tente soit autoportante. La soirée est paisible jusqu'à ce que l'on entende des chiens de berger hurler dans notre direction... Rapatriement du repas à toute vitesse dans la tente. Un bon coup de stress mais finalement les chiens restent à distance.



Etape 2 : Rif. Bianchet - Agordo 17 km / + 1050 m / -1200 m

Réveil au sec et douce montée en alpage d'environ 350 m de dénivelé (sans un seul chien à l'horizon) pour rejoindre le rustique Refuge Pian de Fontana (1632 m). Le gardien est hyper accueillant ce qui nous donne envie d'une pause chocolat chaud.

La météo n'est pas terrible. Après une grimpette jusqu'au passage Forcella de Zita sud à 2393 m, une superbe crête panoramique se dessine. Le passage est aérien et nous fait oublier les gouttes de pluie. Le Refuge de Pramperet (1857 m) tombe à pic puisque la pluie s'intensifie... L'ambiance est chaleureuse, il y a du monde et pour couronner le tout, le gardien nous offre un délicieux plat de pâtes fraîches à l'ail (au top pour l'haleine) qu'il vient de préparer.

Le ventre plein, on attaque la suite du parcours qui nous fait descendre 1000 m plus bas jusqu'au village La Valle Agordina. C'est ici que nos amis Giulia et Tommy nous attendent en voiture pour passer la soirée et la nuit chez eux à Agordo. Bien sûr on craque pour un Aperol Spritz !



Etape 3 : Passo Duran - Civetta 16 km / + 950 m / - 650 m

La matinée commence par un petit exercice d'italien puisque nous nous faisons emmener en voiture par les parents de Tommy au Passo Duran (1601 m). La piste qui mène au refuge suivant, le Refuge Bruto Carestiato (1834 m) est bordée de lys martagon, c'est un gentil papy du coin qui nous les fait découvrir. Nous sommes bien en Italie, le refuge est typique, chaleureux et coloré avec ses volets rouges. La pause café se fait en compagnie des parents de Tommy que nous laisserons ici.

La suite du parcours, en balcon, se dessine dans les pierriers sous de splendides barres rocheuses. Les virages se succèdent ensuite sur une piste, au pied de la Torre Trieste, qui aboutit au Refuge Vazzoler (1714 m). Vallonné et arboré, le sentier nous entraîne dans un écrin de verdure que nous a conseillé Tommy la veille pour y établir notre bivouac face au Mont Civetta (3220 m).



Etape 4 : Civetta - Col de Cuch 14 km / + 800 m / - 1400 m

Le Refuge Tissi (2250 m) n'est plus très loin, on pouvait même l'apercevoir au loin depuis le campement. Sa position est idéale, les baies vitrées de sa salle à manger donnent juste sur les falaises impressionnantes du Mont Civetta. Nous contemplons la vue panoramique le temps d'une boisson chaude pour nous réveiller. Un petit belvédère se trouvant juste sur les hauteurs du refuge permet une vue plongeante sur Alleghe et son lac. C'est incroyable, on peut aussi distinguer la suite du parcours (le glacier de la Marmolada, le plus grand glacier des Dolomites et le sommet Piz Boé).

La poursuite du chemin, au pied des éboulis du Mont Civetta passe sur les rives d'un enchanteur lac alpin, le Lac del Coldai. Après un passage câblé, nous voilà 700 m plus bas au niveau du téléphérique de Piani di Pezzè. Pourquoi ne pas l'emprunter pour descendre en ville? Finalement, on se décide à continuer à pied. Cela nous permet de zigzaguer entre les ravissants chalets des hauteurs d'Alleghe avant de rejoindre son centre ville. Une baignade, un spritz en terrasse, un ravitaillement en nourriture pour les prochains jours, nous voilà au top !

La suite du parcours longe la route durant environ 20 km. Nous optons alors pour le bus afin de gagner un temps précieux. Il nous dépose au Passo Fedaia (2057 m) où nous rejoignons la Via Alta 2. Changement de décor, il y a du monde dans cette petite bourgade touristique et le somptueux Glacier de la Marmolada (3343 m) se dresse devant nous. La journée n'est pas finie, il y a une belle montée en alpage offrant une des vues les plus grandioses sur le glacier. Un berger, ses chèvres, des edelweiss puis le Refuge Viel dal Pan (2432 m) rythment l'ascension. Déjà 400 m de dénivelé et une bonne bière au compteur, nous nous motivons à avancer encore un peu pour partir bivouaquer au col du dessus. Les remontées mécaniques à proximité ne sont pas glamour mais la vue est spectaculaire, d'une part sur le Massif Sella du Piz Boé (Waouh ! on peut même entrevoir l'impressionnante montée en lacets qui nous attend demain) et de l'autre sur le glacier.



Etape 5 : Col de Cuch - Passo Gardena 16 km / + 1100 m / - 1350 m

C'est la journée tant attendue puisque nous devons traverser le massif du Sella depuis le Passo Pordoi (2239 m), une étape particulièrement lunaire. Pour s'y rendre, il faut enchaîner de redoutables virages dans la caillasse, sur les traces de la fameuse "Dolomites Skyrace" (compétition internationale de trail). 600 m plus haut, les falaises forment un entonnoir qui débouche sur le Refuge Forcella Pordoi (2848 m), sorti de nulle part. Un long plateau digne d'un séjour sur la lune nous amène au pied du point le plus haut de notre trek. Pour l'atteindre, le Piz Boé (3 152 m), il faut forcer un peu sur les bras à l'aide des câbles. En haut, contre toute attente, le minuscule Refuge Capanna Piz Fassa se dresse dans la brume au sommet des Dolomites. Pas un chat, mais cela ne nous empêche pas (comme à notre habitude) de faire une pause gourmande.

La descente est elle aussi exigeante, avec des passages câblés et échelles. Elle mène d'abord au niveau du Refuge Boé (2873 m) puis dans un raide vallon de pierres, le Val Tita. Encore une petite via ferrata, accessible sans équipement et nous voilà devant les eaux cristallines du Lac d'altitude de Pisciadù et son refuge (2585 m). Une pause bière ça faisait longtemps...

Une chose est sûre, on ne va pas mourir de faim dans le secteur vu le nombre de refuges ! Pour l'eau non plus d'ailleurs, ce n'est pas un problème, on peut y recharger nos gourdes assez facilement. De là, une assez longue via ferrata, facile mais escarpée nous attend. Il y a un embouteillage car certains ont le vertige mais on arrive à doubler. En sortant du Val Setus, on en prend plein les yeux tellement c'est verdoyant. Les edelweiss sont de la partie ! Au Passo Gardena (2121 m) touristes et amis cyclistes sont au rendez-vous. On plante la tente au calme un peu plus haut dans la pelouse.




Etape 6 : Passo Gardena - Schlüterhütte 16 km / + 900 m / - 950 m

Le réveil est maussade suite à une nuit mouvementée par le vent et la pluie contre la toile de tente. On a la tête dans les nuages, cela annonce la couleur pour la journée. 300 m de dénivelé positif nous mène au Parc Naturel de Puez-Geisler où les silhouettes des montagnes sont terrifiantes et l'ambiance, pesante. Pour couronner le tout, la pluie s'invite à la balade... Elle s'intensifie progressivement ce qui nous fait accélérer la cadence jusqu'au prochain refuge, le Puez Hütte situé à 2475 m où nous dormirons probablement. On est trempés de la tête aux pieds et morts de froid. En passant la porte du refuge, on réalise qu'il n'y a même pas le chauffage. Ce lieu n'est pas accueillant du tout mais nous permet de nous mettre à l'abri. En attendant que nos spaghettis soient servis, on tente de faire sécher nos vestes et chaussettes, en vain... Une femme arrive en pleurs et tremblante de froid dans le refuge, alors par chance les gardiens se décident enfin à allumer le poêle. Durant le repas, on discute avec le couple d'à côté qui nous annonce que le refuge suivant est une petite merveille ! Le problème, c'est cette via ferrata à 2740 m qu'il faudra passer au milieu du parcours... Une autre option est possible mais ça rallonge le parcours de plus d'une heure.

2h plus tard, une petite accalmie nous décide à poursuivre le chemin jusqu'au refuge tant attendu. Pas question de se priver d'une via ferrata alors on se lance en sa direction. La bruine est légère mais ne nous empêche pas d'apprécier les enchaînements d'échelles et de câbles. On arrive enfin au refuge Schlüterhütte (2306 m) qu'on ne distinguera qu'au tout dernier moment tant le brouillard est présent. Cette dernière heure de rando ne nous a réservé que de belles surprises, neige fondue, vent, froid et brouillard. Le refuge est digne d'un hôtel de standing, chaleureux et tout en bois à l'intérieur. Il y a une belle salle commune, une pièce pour la lecture, des douches chaudes avec sèche cheveux (parfait pour nos chaussures finalement, haha) et même des chambres doubles... mais pour les arrivées de dernière minute, c'est dortoir. On a tellement d'affaires à faire sécher, qu'on ne sait plus où les mettre. Même nos duvets sont trempés. On est vraiment contents d'être ici, les gardiens sont aux petits soins. La douche est délicieuse, tout comme le repas que nous partageons en compagnie d'un couple d'allemands et d'une anglaise. La soirée est sympathique autour d'une bonne partie de cartes.



Etape 7 : Schlüterhütte - Kreuzwiesen Alm 22 km / + 550 m / - 900 m

Un petit déjeuner de champion avec œufs et bacon nous permet de débuter la journée du bon pied. Un dernier petit coup de sèche cheveux dans les chaussures et nous voilà sur le sentier. Il a bel et bien neigé sur les hauteurs hier soir (autour des 2600 m).

Cette étape, sans difficulté particulière, nous fait quitter les Dolomites pour partir dans le Tyrol. On est bien loin des portions alpines que nous venons de passer. Ici, il y a de grands pâturages, des fermes et de longues pistes bordant des parcelles agricoles. A mi-parcours, le curieux Lac Rina (Glittnersee) sorti de nulle part nous intrigue. C'est un petit plan d'eau naturel avec un voilier en bois en plein milieu...

Nous arrivons au refuge Kreuzwiesen Alm à 1924 m, il y a plein de monde en terrasse et les cochons nous accueillent. Le refuge est vraiment magnifique et nous autorise à planter la tente juste devant. Lors du repas, on fait la rencontre d'un tchèque avec qui on passera la soirée. Au moment de revenir à la tente, surprise ! Il y a un voisin de tente qui ronfle comme un porc, haha c'est génial !



Etape 8 : Kreuzwiesen Alm - Stein 40 km / + 1500 m / - 2350 m

Départ à l'aube, il faut avancer plus vite que prévu car la météo s'annonce mauvaise dans deux jours. La journée débute par une piste, d'abord à travers les pâturages puis en forêt pour descendre les 1200 m de dénivelé nécessaires pour atteindre la ville de Niedervintl (755 m). Après avoir marché 15 km et environ 3h30, on a déjà faim (même s'il n'est que 10h30) mais rien n'est ouvert en ce dimanche... sauf la station d'aire d'autoroute. On a trop faim alors on part en mission commando pour traverser la route en question et commander la pizza de nos rêves, haha.

Là, on décide de faire de l'autostop car la suite du parcours, majoritairement en bordure de route ne nous attire pas trop. Direction Pfunders (1134m) grâce à une habitante du coin que nous remercierons par quelques carrés de chocolat.

Une longue piste permet de s'élever dans une gorge et le long de la rivière Weitenbergalm. Le décor est de plus en plus montagnard et cette même piste amène au refuge Obere engbergalm (2123 m) où nous prenons un petit remontant.

Les dénivelés s'enchaînent jusqu'au ravissant petit Lac Silvella (2485 m) où le rafraîchissement est de mise et l'objectif est enfin visible, le Gliderschartl pass à 2644 m. Avec plus de 30 km dans les jambes, la marche commence à se faire plus difficile mais on continue de profiter de la vue spectaculaire sur les glaciers. A la descente, c'est plus critique... il y a plus de 900 m à descendre et on est épuisés !

Il est 20h, les derniers pas pour arriver à Stein (1555 m), ce hameau du bout du monde, sont boiteux haha... Il n'y a pas moyen, on a plus la force de monter la tente après cette longue journée de marche. Jérémy part demander au gîte s'il reste de la place et la femme (en voyant nos tronches) nous surclasse dans sa plus grande chambre (bon dodo en perspective).



Etape 9 : Stein - Hintertux 16 km / + 1750 m / - 600 m

On est comme des rois devant le buffet du petit déjeuner et après une bonne nuit réparatrice. Aujourd'hui c'est une journée particulière puisque 700 m de dénivelé plus haut, nous passons à pied la frontière entre l'Italie et l'Autriche (Pfitscher Joch 2251m).

Une fois en Autriche, un long sentier en balcon dévoile une vue plongeante sur le splendide lac Schlegeisspeicher. Nous croisons un groupe de randonneurs et leur chien équipé de sacoches. Ils nous mettent en garde sur le passage du prochain col à 2912 m (Friesenbergcharte). La neige des derniers jours complique apparemment sa traversée (d'autant plus qu'il y a des passages câblés). Notre arrivée au refuge Olpererhütte (2389 m) offre l'un des plus beaux panoramas de notre périple. Sa terrasse donne droit vers ce lac aux eaux turquoise. Le contraste est saisissant avec les glaciers et les pentes verdoyantes qui l'entourent. On restera un moment ici pour s'imprégner des lieux et pour profiter d'un bon repas panoramique. Durant le repas, plusieurs randonneurs nous confirment que le col n'est pas praticable. Nous entamons donc le contournement de la montagne en commençant par les 600 m de descente pour atteindre les rives du lac Schlegeisspeicher. De là, un suisse nous prend en autostop pour relier Mayrhofen. Les environs sont superbes et la ville sympathique. On en profite pour acheter des provisions avant de prendre le bus en direction de Hintertux. Cette station huppée marque notre retour sur l'itinéraire initialement prévu. D'abord en forêt, le sentier s'élève pour rejoindre la belle cascade Schieierfall, située 500 m plus haut. Juste au dessus, de grands alpages nous permettront de monter le bivouac avec les cloches des vaches en fond sonore. Raison de plus pour sortir son chocolat Milka, haha.




Etape 10 : Hintertux - Lizumer Hütte 11 km / + 900 m / - 900 m

C'est une journée pluvieuse et orageuse qui s'annonce, alors le réveil se fait de bonne heure. A 7h45, nous avons déjà avalé 500 m de dénivelé ce qui nous permet de profiter des premières lueurs matinales sur la vallée d'Hintertux. Sur le versant opposé, une colonie de chamois nous émerveille. Lucie est hypnotisée par le spectacle mais Jérémy préfère ne pas perdre de temps car il reste du chemin et des passages en altitude que nous devons franchir avant le mauvais temps...

Un peu comme un mirage, un lac féérique vole au milieu des nuages, le lac Junssee à 2623m. Le sentier s'élève dans un éboulis dont on distingue à peine la trace pour finalement atteindre le Col Pluderling (2778 m), déjà plongé dans le brouillard.

A la descente, il y a des jalons pour se repérer et la bruine fait son apparition. On s'empresse d'avancer mais dans la précipitation, on loupe quand même le chemin, ce qui nous fait traverser des restanques herbeuses jusqu'au fond de vallée. Après ces 700 m de dénivelé négatif, la pluie tombe fortement et une toute dernière piste nous sépare du refuge Lizumer Hütte (2019 m). On termine en courant pour se mettre vite à l'abri. A peine rentrés dans le hall, l'orage éclate. Il n'est que 11h du matin, ce qui nous laisse une demi-journée de repos. Nous optons pour une nuit en dortoir bien au sec.




Etape 11 : Lizumer Hütte - Innsbruck 17 km / - 1450 m

Il neige juste au dessus du refuge et on quitte la haute montagne pour redescendre par une piste déroulante qui traverse la zone militaire de l'armée autrichienne. Cette étape nous ramène progressivement à la civilisation. Il faudra d'abord traverser plusieurs quartiers afin d'arriver à Hall in Tirol (574 m) où nous prendrons un bus pour relier Innsbruck.


N'hésitez pas à nous écrire si vous avez des questions, on y répondra volontiers.

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